L'architecture selon Gordon Matta-Clark
Ouvrage de Roula Matar, Les presses du Réel, janvier 2022
Figure majeure de l'art américain des années 1970, Gordon Matta-Clark (1943-1978) a produit, pendant les dix années que compte sa brève carrière, un corpus d'œuvres d'une grande diversité. Expérimentations sur la matière, installations, performances, découpes architecturales, dessins, films, photographies, ou photomontages témoignent de cette multiplicité de démarches et de mediums explorés. C'est au travers de ses découpes (cuttings) et dissections de bâtiments qu'il s'est fait d'abord connaître, en intervenant sur des immeubles abandonnés et voués à la démolition. Ces spectaculaires découpes ont longtemps prévalu dans les analyses, et ont le plus souvent été considérées comme des attaques portées contre l'architecture.
Pourtant, architecte de formation, Gordon Matta-Clark a surtout cherché à expérimenter, selon ses termes, « les usages alternatifs d'espaces qui sont les plus familiers ». Sur la base de documents d'archives, cet ouvrage propose de lire ses travaux depuis ce point de vue venant de l'architecture, en envisageant les mouvements de sa pensée spatiale et ses enjeux architecturaux, dans tous les lieux singuliers explorés. Que ce soit en découpant les murs, planchers et plafonds de bâtiments abandonnés ; en créant une perspective implicite sous une dalle funéraire ; en installant un abri dans un arbre ; en dessinant des maisons-paniers mobiles ; en construisant un mur à partir de déchets trouvés dans la rue ; en voulant grimper au ciel avec une échelle en corde ou en voulant habiter dans un immeuble ballon, que disent ses projets de son idée d'architecture ?
« Bien que Gordon Matta-Clark soit architecte de formation, cette partie de son œuvre est souvent ignorée dans le champ architectural, sans doute parce trop critique des architectures uniquement techniciennes. L'objectif de la réflexion présentée ici par Roula Matar – par ailleurs fort bien illustrée – est précisément de mettre en valeur, au-delà des découpes spectaculaires, les autres réalisations de l'artiste et d'analyser un éventail de projets à travers les mouvements de sa pensée spatiale [...]. Dans cette étude, Roula Matar enrichit l'analyse formelle des œuvres d'un relevé précis du vocabulaire de Matta-Clark, qui révèle les alternatives proposées par les moyens déployés. Ses notes, ses carnets, ses descriptions de processus de construction permettent de retracer les transferts d'idées d'un projet à un autre, mais aussi les débordements des champs disciplinaires (notamment les passages du registre des arts plastiques au registre de l'architecture). » Christian Ruby, Nonfiction.fr
(texte éditeur).